Lettre ouverte au Ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, Monsieur Stéphane LeFollPas de développement de la filière apicole sans abeilles et sans apiculteurs L’absence de réel dialogue constructif au sein des différents organes de la mise en oeuvre du plan de développement durable de l’apiculture (PDDA) est consternante. Cette absence de réelle écoute a nourri nombre d’incompréhensions et tensions et a conduit, comme vous le savez, nos cinq organisations apicoles à lire un texte commun de protestation avant de se retirer de la réunion du Comité stratégique pour l’apiculture, le 17 décembre dernier. Les demandes de rendez-vous que nous vous avons adressé sont restées jusqu’ici sans réponse. La contamination généralisée de l’environnement, en particulier par les produits phytosanitaires systémiques, induit un contact permanent entre les abeilles et les pesticides avec pour conséquences : intoxications chroniques, diminution des défenses immunitaires, amplification de l’effet des autres agresseurs, varroa, noséma, virus. L’exemple italien montre qu’avec la suppression des néonicotinoïdes, l’abeille réagit mieux face aux autres agresseurs. Ainsi, en zone de grandes cultures les mortalités de ruches ont diminué de 37,5 % à 15 %1. La préservation de notre cheptel passe par une révision profonde du modèle agricole, dont la première étape doit être une interdiction de tous les néonicotinoïdes, pour tous leurs usages et une suspension des homologations d’insecticides systémiques dans l’attente de nouvelles procédures adaptées. Malheureusement, vous continuez de donner des avis favorables à d’autres insecticides systémiques2 sur la base de procédures obsolètes, alors même que l’EFSA a souligné que les procédures d’homologation ne sont pas adaptées aux systémiques en particulier et que le risque pour les abeilles est sous-évalué. D’autre part, la procédure de révision de la « mention abeilles », qui semble s’orienter vers des mesures moins protectrices, s’est faite sans que le Comité apicole n’ait été consulté. Ne pas prendre les mesures qui s’imposent, c’est risquer sur le long terme des conséquences au détriment de l’intérêt même de toute la société : Les apiculteurs ne peuvent se satisfaire d’une agro-écologie sur le papier et de réunions de filière où les représentants du monde apicole ne sont que peu écoutés. Monsieur le ministre vous avez déclaré vouloir faire de la France un pays leader de l’agro-écologie. Il est temps de mettre ce projet en oeuvre et de commencer par assainir le milieu dans lequel vivent les insectes pollinisateurs et auxiliaires, en supprimant l’utilisation des néonicotinoïdes et autres pesticides systémiques. Il est désormais important d’aller de l’avant. Les organisations apicoles que nous représentons, ne refusent pas de travailler à la mise en oeuvre du PDDA mais veulent être reconnues comme acteurs représentatifs des producteurs. Manuel Roger, responsable de la section apicole, Confédération paysanne 1 Porrini, Sgolastra, Sabatini, 2008. Rete per il monitoraggio dei fenomeni di spopolamento e mortalità degli alveari in Italia (APENET). Apoidea, 5 (2): 83-87. |