Merci pour l’intérêt que vous portez à une lutte pertinente, préventive, efficace et enfin sélective contre le Frelon asiatique.
Alors que le Frelon asiatique (FA) est présent en France depuis 2004 et actuellement dans 8 autres pays européens, les réponses apportées jusqu’à ce jour par les organismes en charge de la problématique ne semblent pas satisfaire l’ensemble des acteurs économiques dont l’apiculture. Ils n’apportent pas non plus de réponses proportionnées aux enjeux de santé publique au sein des communes et environnementaux liés à l’impact du vespidé sur l’entomofaune et la biodiversité.

À titre d’exemple, la FDGDON (Fédération Départementale des Groupements de Défense contre les Organismes Nuisibles) du Finistère (mon département), très courageusement engagée depuis plus de 4 années dans un plan de lutte collective et curative (celle qui consiste à détruire des nids dès qu’ils sont découverts) en convention avec la quasi-totalité des EPCI (Établissement public de coopération intercommunale) du département, fait le constat que près de 6 000 nids sont détruits chaque année (l’une des, sinon la plus grande concentration de France). Ces chiffres illustrent parfaitement qu’il est illusoire d’espérer que cette méthode seule puisse un jour réduire la prolifération de cette espèce présente à un niveau souvent bien trop élevé et insupportable pour la faune entomologique et pollinisatrice. Ceci est d’autant plus inquiétant que les insecticides de synthèse trop souvent utilisés lors de ces opérations de désinsectisation impactent l’environnement à tous les niveaux de la vie animale dans l’écosystème (oiseaux, mammifères insectivores, amphibiens, etc…) et dans des proportions parfois alarmantes sans qu’aucune étude d’impact n’ait été diligentée à ce jour.

Il serait utopique de penser éradiquer un jour le FA en Europe et aucun dispositif de piégeage, aussi efficace soit-il, ne permettra un jour cette prouesse. Seules les îles suffisamment éloignées du continent pourraient parler d’éradication grâce au piégeage au BCPA qui seront à positionner côté continent lorsque l’EEE aura disparu et ainsi éviter sa réintroduction. Il est simplement permis de penser que l’on puisse la réguler avec une efficacité suffisante afin de réduire considérablement et significativement ses impacts cités précédemment si, et seulement si, les conditions suivantes sont réunies :

1 – Le maillage
La pose des BCPA doit être conduite sur les territoires par les EPCI, car elles ont les compétences en matière de régulation des nuisibles. En l’absence de l’engagement de la collectivité, le niveau communal peut être engagé pour assurer la sécurité des concitoyens. Une organisation cohérente, encadrée, pérenne et stratégique pourra alors être mise en place sur les territoires pour couvrir les lieux à protéger en priorité : les établissements scolaires, les installations sportives, les lieux de rassemblement en plein air de population en général (parcs et jardins…), les ruchers citadins, les hameaux… La neutralisation écologique des nids de FA que je pratique depuis quelques années m’amène également à constater que les lieux où le FA y trouve eau, proies et abri sont des sites favorables à la nidification et le resteront toujours. Ces lieux seront donc également à privilégier pour l’installation d’un piégeage. Chaque année, il est indispensable de revoir le maillage en le complétant le cas échéant en cas de découverte d’un nouveau nid.
La lutte s’engage de manière préventive des nids, au début du printemps, en agissant sur l’ensemble des reines de FA à leur sortie d’hibernation sur les sites propices et en amont de la nidification et 55 jours après le début de celle-ci. En effet, la reine reste disponible à la capture dans l’environnement durant cette période avant de rester définitivement au nid, période qui précède la naissance de cinq à six ouvrières.
En ville, les reliefs créés par les hauts bâtiments ne permettent pas une diffusion uniforme des effluves et nécessitent parfois l’installation de BCPA peu distants. En campagne, un BCPA par hameau est un minimum, disposé au vent dominant du site à protéger. Pour ces raisons, les distances entre 2 BCPA sont très aléatoires et dépendantes de nombreux paramètres dont ceux liés au contexte rural ou urbain. Toutefois, un BCPA tous les 200/300 m en ville à titre d’expérimentation en 2021 est préconisé puis réajusté en cas de découverte de nids résiduels. L’espace urbain devra être tout d’abord ceinturé puis « maillé » sur le reste du territoire.
Le maillage est ce qui va enfin permettre une vraie régulation de l’EEE afin de la rendre quasi inexistante sur le territoire couvert par le dispositif.

2 – L’organisation
Suite à des expériences malheureuses (vandalisme et vols) concernant le déploiement des systèmes de piégeage, il s’avère indispensable de les installer chez les citoyens volontaires (proches des sites choisis) prêts à assurer la garde, le suivi et l’entretien du matériel confié. Celui-ci doit être acquis par l’institution qui doit en rester propriétaire afin de pérenniser le plan de lutte qui doit être renouvelé chaque année en routine.
Les volontaires, candidats à l’accueil d’un BCPA, seront invités à faire des visites périodiques des BCPA et l’inventaire des captures qui vont être compilées par les services municipaux ou intercommunaux afin de renseigner les organismes de recherche (MNHN) et Jabeprode pour améliorer sans cesse ce système de piégeage.

3 – Les moyens
Les moyens mis en œuvre doivent répondre à des critères les plus marqués de sélectivité, d’attractivité, d’efficacité et de durabilité.
Le Bac de Capture Préventif Autonome (BCPA) Jabeprode correspond complètement à ces exigences. De par son format, ses caractéristiques techniques et sa facilité d’emploi, le modèle préconisé est le BCPA standard aux normes Europe pour sa mise à disposition chez les particuliers.
Ce matériel est créé pour être pérenne dans le temps avec une longévité estimée à plus de 10 années, ceci permettant un investissement qui sera peu coûteux sur la durée au vu de la durabilité et de ce que la lutte curative (la destruction chimique des nids) représente, tant en termes de budget que de conséquences environnementales, non évaluées à ce jour.

4 – La détection
En complément de la lutte préventive par BCPA, il serait bon aussi d’inviter les habitants à être curieux, à partir de mars et jusqu’à fin mai, en visitant les abris de jardin, cabanes des enfants, carports, niches à chien non occupées, vieilles granges, abris bus, avancées de toit, ruines… afin de vérifier si un petit nid primaire ne s’y est pas installé au plafond (voir photo). Tout signalement pourrait être fait en mairie afin que soit organisé la neutralisation mécanique par aspiration de nids, si découverts.

Côté pratique
La sélectivité du BCPA est initiée par un réducteur d’entrée calibré au 1/100ème de mm correspondant à la taille du thorax d’une reine du FA en ne permettant pas la rentrée de la reine du Frelon européen (plus haute) et laisse ressortir tous les insectes de taille inférieure à l’ouvrière du frelon asiatique. Un document nommé « Fiche technique », disponible en téléchargement sur le site Jabeprode.fr en précise tous les aspects spécifiques qui sont à suivre avec justesse si l’on souhaite une optimisation des captures. L’élément déterminant de l’efficacité réside dans l’appât utilisé. Des cadres de ruche contenant du miel cristallisé (issus de ruches découvertes mortes à la sortie de l’hiver ou de la visite de printemps) seront broyés, émiettés et recouvriront toute la surface du bac inférieur du BCPA. Un toit large, non fourni pour des raisons d’encombrement lors de l’expédition sera à prévoir. Pour l’appât cité, qui a donné les meilleurs résultats à ce jour, le toit doit être opaque, une plaque latérale d’un gros électroménager mis au rebus fera l’affaire car peu coûteux et pérenne. Si des températures de
plus de 30°C sont courantes, prévoir un isolant sous le toit. Sa grande taille sera nécessaire pour 2 raisons : la protection du BCPA contre les intempéries (éviter la dégradation du matériel et de l’appât) et la canalisation des effluves. En cas d’utilisation d’autres appâts liquides conventionnels (cidre, sirops de fruits rouges saturés en sucre…), il est utile d’utiliser un toit translucide (plexiglas ou vitrage) pour créer un effet de serre indispensable pour monter suffisamment la T° pour évaporer les appâts. Enfin, couvrir le toit d’un lest (pierre, parpaing… non fournis) afin de stabiliser l’ensemble. Le positionnement du BCPA se fera sur un support stable à 1 m du sol et dans une zone ensoleillée. La cohésion et la pérennité du maillage sera indispensable sur les plus larges territoires possibles pour en éviter la recolonisation.

Points clés :
– Respecter parfaitement les conseils de fabrication et de montage du bac de capture des fondatrices, que vous trouverez sur le site internet ;
– Utiliser le bon appât ;
– Pour le piégeage de printemps des fondatrices, mettre le piège en fonctionnement dès le mois de février, et pour le piégeage d’automne dès la mi-septembre ;
– Positionner le piège à 1 mètre du sol et au soleil ;
– Protéger le bac de capture des averses de pluie qui pourraient dégrader l’appât, en posant dessus un toit large ;
– Dans les zones ayant déjà accueilli des nids de frelons asiatiques, pratiquer un maillage de la pose des pièges sur un rayon de 800 mètres ;
– Mettre en oeuvre localement le piégeage collectif ;
– Faire un relevé des prises par quantités et par espèces, ces résultats aideront à améliorer la conception du piège pour encore plus de sélectivité.

 

Bonne chasse à tous.

Denis JAFFRÉ

Pour vos questions et vos commandes, contactez Denis JAFFRÉ :  vespavelutinabzh@orange.fr

 

Article paru dans l’Abeille de France d’avril 2021