EDITORIAL de Frank ALÉTRU, Président du Syndicat National d’Apiculture et Président de l’Association des Apiculteurs professionnels européens (EPBA)

Ils se disaient tous contre , mais le pour l’a emporté !

Preuve que le sujet n’était pas anodin ; c’est très tard dans la nuit, en présence d’encore 135 députés dans l’hémicycle, à plus de 2 heures du matin, le 6 octobre, que se sont clos les débats des plus tendus entre opposants et pro-néonicotinoïdes, aboutissant à un vote favorable à la réintroduction temporaire des bien-nommés insecticides “tueurs d’abeilles”, au prétexte de vouloir “sauver” la filière betterave. Le vote solennel ayant eu lieu le même jour à 16 heures. Ce vote étant “transparent”, vous pourrez ainsi mesurer à quel niveau se situe l’engagement, la sensibilité aux problèmes écologiques et le courage de vos députés.
Pourtant, dans les couloirs du Palais Bourbon, au cours des auditions préalables, ou encore face aux médias, la très grande majorité des députés admettait l’extrême toxicité des
néonicotinoïdes. Jusqu’au ministre de l’Agriculture lui-même qui le concédait, tandis qu’une grande absente se faisait remarquer, la ministre de la Transition écologique et solidaire, Barbara POMPILI, elle qui, il y a quatre ans, avait soutenu l’interdiction des néonicotinoïdes, et qui est maintenant devenue, non plus la “petite reine” des abeilles, mais la reine du rétro-pédalage !
Le constat est dramatique, avec une filière betterave qui souffre plus du libre-échange que de la jaunisse et, sous la pression du lobby du sucre, un gouvernement qui a été incapable de se saisir de cette situation pour amorcer et accompagner la transition économique, sociale et écologique qui s’impose à l’agriculture, si elle se veut durable et saine. Le ministre a hélas choisi de mettre en opposition économie et écologie. C’est cet
incompréhensible scénario qui l’a emporté !
Emportés aussi, les maisons, les hameaux, les rues, les ponts, les voitures, les animaux et… les personnes victimes d’un phénomène d’une rare violence, aboutissant à un bilan
effroyable. Ces pluies torrentielles qui s’abattent quasiment chaque année sur le Sud-Est de l’Hexagone au point de provoquer de véritables raz-de-marée, nous lancent un signal
d’alarme de plus en plus sévère, et qui devrait aussi amener nos gouvernants à des prises de décisions urgentes en faveur du climat.
L’heure est à la solidarité. Solidarité avec les personnes sinistrées et les exploitations apicoles durement touchées.
Par le biais du Syndicat National d’Apiculture, de nos syndicats et associations départementales situés dans les zones impactées, nous allons tenter d’apporter le plus grand soutien aux victimes et aider à la reconstitution du matériel détruit.
Solidarité aussi avec nos collègues apiculteurs dont les ruchers se trouveront dans les zones impactées par des néonicotinoïdes.
Ceci étant, notre combat contre la dérogation ne s’arrête pas là.
Rassemblés et unis, syndicats apicoles, associations environnementales, ONG et députés envisagent différentes possibilités d’actions en justice, dont une devant la Cour de
justice de la République.
La période des récoltes est révolue, il nous faut maintenant tout mettre en oeuvre pour permettre la vente de nos productions.
L’Interprofession des produits de la ruche, InterApi, a constitué un groupe de travail qui étudie les différentes options pour faciliter l’écoulement et communiquer sur les qualités du miel.
De son côté, le gouvernement nous annonce un ambitieux plan de soutien à la filière apicole, ainsi que la mise en place effective pour la fin de l’année de la révision de la “Mention Abeilles” pour laquelle le SNA est aux avant-postes.
Nous sub issons un nouveau pic dans le développement de la pandémie COVID-19 dont les mesures de prévention sanitaire impactent notre quotidien ainsi que le fonctionnement de nos associations. Cette situation ne doit pas pour autant paralyser la vie de nos structures, aussi je vous invite à tout mettre en oeuvre et à utiliser, si besoin, les moyens technologiques modernes pour maintenir et le lien et les services auprès des apiculteurs qui sont et font la force de l’apiculture française.