EDITORIAL de Frank ALÉTRU, Président du Syndicat National d’Apiculture et Président de l’Association des Apiculteurs professionnels européens (EPBA)

Constats, incertitudes et espoirs

Année du centenaire de votre revue et du Syndicat National d’Apiculture, 2020 se termine. Une année qui s’est déroulée dans une ambiance inédite et des plus chaotiques, réunissant aussi toute la panoplie des problématiques auxquelles l’apiculture peut être confrontée.
En plein contexte Covid-19 et confinement, tout d’abord, l’action conjuguée des syndicats apicoles et de l’interprofession auprès du ministère de l’Agriculture a rendu possibles les travaux au rucher, tant pour le petit producteur que pour l’apiculteur professionnel.
Puis, le moment venu du bilan des récoltes de miel a montré une France coupée en deux : une moitié nord, satisfaite ; et une moitié sud qui serre les dents à la suite d’une période de mauvais temps contrariant les miellées, puis d’une sécheresse intense, suivie encore d’une inondation aux conséquences catastrophiques également pour des milliers d’habitants de nombreuses communes défigurées.
La plus grande vigilance a été nécessaire aux apiculteurs pour contenir au niveau le plus bas les populations de varroas dans leurs colonies, et pour les protéger aussi des attaques des frelons asiatiques, présents aujourd’hui sur la quasi-totalité du territoire.
Sur ces deux problématiques, le Syndicat National d’Apiculture, au sein de l’Interprofession InterApi, a sollicité le ministère de l’Agriculture pour soutenir et faciliter la mise au point de nouveaux modes de traitements contre la varroase, lui rappelant aussi l’urgence à agir contre le frelon asiatique pour limiter les nuisances qu’il génère dans les ruchers.
Il n’est dorénavant plus possible d’attendre encore pour organiser une lutte collective nationale contre Vespa velutina. C’est pourquoi le Syndicat National d’Apiculture va s’y employer dès le début de l’année 2021. Les premières informations vous sont données dans ces pages.
Pour les apiculteurs.trices qui vendent sur les marchés, les restrictions imposées par les mesures sanitaires et l’annulation des marchés de Noël ont mis bon nombre d’entreprises en difficulté. Afin qu’elles puissent obtenir un soutien économique, le Syndicat National d’Apiculture, associé à une initiative intersyndicale, a demandé au ministre de l’Économie et des Finances que le fonds de solidarité leur soit attribué.
Enfin, la décision du gouvernement, cet automne 2020, de ré-autoriser les néonicotinoïdes sur les cultures de betteraves sucrières, restera gravée dans la mémoire des apiculteurs. Un tel retour en arrière, qui fait fi du désastre récurrent subi par les apiculteurs, des travaux des scientifiques et des attentes des consommateurs, est indigne d’un gouvernement responsable.
Quand la cohésion de la société en faveur de la protection de l’environnement, de la biodiversité et de la santé humaine devrait inspirer les parlementaires, ce vote est aussi incongru qu’inacceptable.
Notre monde évolue. Les connaissances scientifiques progressent, les technologies ouvrent des perspectives nouvelles…
Mais nos dirigeants renient sans scrupule les promesses faites durant leur campagne, dans le plus grand mépris de leurs électeurs et au-delà.
Cette décision est vécue comme une véritable trahison, un mensonge d’état, qui participe de la défiance du monde apicole et de la population toute entière envers le gouvernement.
Contre cette loi irresponsable aux conséquences très graves, le Syndicat National d’Apiculture a saisi le Conseil constitutionnel par deux fois en novembre dernier, avec certaines ONG, pour en contester la légalité.
Ce même gouvernement a parallèlement annoncé vouloir présenter, au cours de ce mois de décembre, la révision de l’arrêté « Mention abeilles », indispensable à une meilleure protection des pollinisateurs contre les traitements chimiques appliqués sur les cultures en fleurs. Révision déjà promise il y a plus d’un an… Nouvelle trahison à venir ?
Nous formons le voeu que gouvernement et dirigeants syndicaux trouvent par le dialogue une issue favorable à ces situations de crise récurrentes, permettant de restaurer la confiance.
La cohésion du pays doit inciter les décideurs à bâtir un système économique, écologique et sanitaire durable. La cohésion des apiculteurs est elle aussi nécessaire et indispensable pour faire entendre la voix de notre filière. Le Syndicat National d’Apiculture en a fait depuis toujours sa mission. Souhaitons que notre toute jeune interprofession, InterApi, soit l’outil complémentaire pour y parvenir.
Je veux remercier, pour clôturer cette année, tous les collaborateurs et collaboratrices de la revue et du Syndicat National d’Apiculture qui n’ont jamais baissé les bras malgré le contexte sanitaire compliqué. Ils et elles sont parvenus à boucler les onze numéros de « L’Abeille de France » dans les délais habituels, s’efforçant de vous apporter l’essentiel des informations selon nos différentes rubriques, et à assumer avec efficacité l’ensemble de nos fonctions syndicales.
Je veux dire merci à vous aussi, lecteurs et lectrices, pour votre fidélité, et parce que vous êtes toujours plus nombreux à nous lire, à nous adresser vos contributions et vos meilleures photos.
Je salue également toutes celles et ceux qui rejoignent, chaque année, nos structures syndicales départementales.
À l’aube de cette nouvelle année, je tiens à vous exprimer toute ma reconnaissance pour les messages d’encouragements qui nous ont été adressés, et à vous souhaiter, en retour, de joyeuses fêtes de fin d’année !

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