O Cruiser ave, morituri te salutant ! (*)
Propos recueillis par Bernard LAMIDEL – Editorial de l’Abeille de France de Juillet-Août 2011.
Je viens de visiter une république où les dirigeants ont déjà été condamnés pour avoir autorisé la vente de produits tuant les abeilles et ils recommencent une nouvelle fois avec le Cruiser ® OSR !
– Toi tu es encore indigné.– Et pourtant dans ce pays, il y a des lois sur la récidive !
– Si tu connaissais Darwin, tu saurais que ces lois ne s’appliquent pas aux dirigeants qui bénéficient d’une immunité acquise, en vertu de sa théorie sur l’évolution.
– Admettons ! mais comme dit la Région Champagne – Ardenne, cette décision est quand même prise au mépris du droit, de la santé publique et de l’environnement, et ce produit qui contient deux fongicides et un insecticide, le thiamethoxam, est dangereux !
– Admettons ! mais comme dit la Région Champagne – Ardenne, cette décision est quand même prise au mépris du droit, de la santé publique et de l’environnement, et ce produit qui contient deux fongicides et un insecticide, le thiamethoxam, est dangereux !
– Les dirigeants de ce pays n’ont pas pu prendre une telle décision sans s’entourer de garanties et solliciter l’avis d’un organisme compétent et indépendant.– Effectivement, ils disposent d’une Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), mais je ne sais pas si elle est indépendante. Je me rappelle seulement que Shakespeare disait déjà : « Lobby or not lobby ». Veux-tu quelques exemples tirés de l’avis de l’ANSES ? Bien sûr, je pourrais peut-être ainsi dissiper tes craintes.
– Les risques pour le consommateur sont considérés comme acceptables. Or on n’a jamais demandé aux consommateurs de ce pays s’ils acceptaient ce risque et on n’a pas fait d’essais en double aveugle sur eux. On s’est contenté de souris, rats, lapins, cobayes et chiens !– Quand on parle d’acceptabilité, il s’agit d’un risque acceptable par le fabricant du produit, donc d’un risque économique. On ne peut pas demander aux victimes potentielles d’accepter un risque qui n’a pas été étudié par le fabricant et par l’ANSES. En revanche, il appartient aux organisations de consommateurs de ce pays d’organiser ces études et de recruter des volontaires pour faire les essais. Syngenta a respecté le principe de précaution, puisqu’il écrit que son produit est dangereux et qu’en dépit de cela, il a le droit de le vendre. Après tout, c’est à l’utilisateur de prendre ses responsabilités !
– Admettons que les humains de ce pays soient intelligents, qu’ils s’organisent pour se défendre, que les utilisateurs lisent bien la notice et évitent ainsi le contact du produit avec leur peau et leur système respiratoire. Mais il y a le risque de contamination des eaux souterraines et le risque pour les organismes aquatiques. Eux, ils n’ont rien demandé et ils ne peuvent pas s’organiser pour se défendre !
– Admettons que les humains de ce pays soient intelligents, qu’ils s’organisent pour se défendre, que les utilisateurs lisent bien la notice et évitent ainsi le contact du produit avec leur peau et leur système respiratoire. Mais il y a le risque de contamination des eaux souterraines et le risque pour les organismes aquatiques. Eux, ils n’ont rien demandé et ils ne peuvent pas s’organiser pour se défendre !
– Effectivement, l’ANSES trouve ces risques acceptables même si Syngenta écrit que son produit est très toxique pour les organismes aquatiques. Mais je croyais que tu t’occupais d’abeilles, alors qu’as-tu à faire de ces organismes aquatiques ? Quant à la contamination des eaux souterraines, elles sont déjà polluées, alors une molécule de plus ou de moins, cela ne se verra pas et ne se saura pas. En plus, le consommateur a toujours la possibilité de boire de l’eau en bouteille, ou autre chose.
– Admettons, mais le risque lié aux poussières n’a pas été évalué par l’ANSES au motif qu’il n’y aurait que très peu de poussières. Or Syngenta écrit qu’il ne faut pas vider la poussière du fond du sac dans la trémie, donc il y en a, ne pas semer par vent fort, au plus 3 Beaufort au niveau du sol, et diriger les poussières vers la surface du sol ou dans le sol. De plus, les utilisateurs n’ont pas tous un anémomètre gradué en Beaufort !
– Cela est sans importance, car il n’y a pas de réglementation sur la teneur maximale en produits chimiques dans l’air que nous respirons, à la différence de ce qui existe pour l’eau potable. Ainsi, dans mon pays, il y a 56 substances actives recherchées, dont 6 insecticides et 18 fongicides. Alors, un ou deux de plus, quelle importance ?
– Admettons, mais il y a la synergie, fonctionnant dans les deux sens, entre le fongicide métalaxyl M qui renforce le pouvoir insecticide du thiamethoxam. Bayer Crop Sciences détient un brevet là-dessus !
– Et alors ? Ton brevet est écrit en anglais et Syngenta n’avait aucune raison de le fournir à un organisme qui ne le demandait pas et dont ce n’est pas la langue maternelle.
– Admettons, mais j’ai encore d’autres questions :
– les DL 50 sont celles des trois produits pris séparément,
– il n’y a pas eu d’études sur le couvain,
– la guttation n’a pas été prise en compte,
– la contamination du pollen n’a pas été étudiée suite à l’effet systémique
– la question de l’action des deux fongicides sur les champignons de l’abeille et du pollen n’a pas été posée !….
– là, je crois que tu dépasses les bornes. Si je t’ai bien compris, tu voudrais que cette république devienne une démocratie. Après tout, c’est aux victimes à apporter la preuve que le produit nuit à la santé des abeilles et pour cela elles ont un Institut Technique qui va se pencher sur la question.
(*) Celui qui va mourir te salue