Communiqué de presse du 13/07/2021

Dans une décision du 12 juillet 2021, le Conseil d’Etat rejette les recours formés par l’Union des industries de la protection des plantes (UIPP) et 3 organisations de producteurs contre le décret n° 2018-675 du 30 juillet 2018 qui interdit cinq substances actives de la famille des néonicotinoïdes présentes dans les produits phytopharmaceutiques.

Ces recours visaient à mettre en échec l’interdiction des néonicotinoïdes prévue par la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

Rappel des faits :

Le Parlement français a décidé en 2016, d’interdire définitivement les insecticides néonicotinoïdes, à compter du 1er septembre 2018 (une interdiction générale depuis remise en question par l’actuel Parlement, qui a autorisé des dérogations sur les betteraves sucrières). C’est ce principe d’interdiction générale, voté en 2016 qui faisait l’objet d’un recours de la part des firmes productrices de pesticides, et d’associations agricoles qui leurs sont favorables. Le recours ne portait pas sur le fond, mais sur la forme. Les requérants arguant du fait que l’Etat français n’avait pas respecté les différentes étapes d’interdiction d’un pesticide, prévues dans le règlement européen. Dès lors, le Conseil d’Etat a saisi la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), afin d’avoir son avis avant de rendre sa décision. Dans son arrêt du 8 octobre 2020, la CJUE a considéré que la procédure d’interdiction prévue par le règlement européen avait été respectée par la France.

En ce lundi 12 juillet, le Conseil d’Etat a donc logiquement confirmé cette position, en validant la procédure d’interdiction des insecticides néonicotinoïdes. Toutefois, le juge administratif ne se contente pas d’apporter une fin de non-recevoir aux firmes agrochimiques, mais en profite pour poser quelques éléments de fond en faveur des apiculteurs français :

1°/Le Conseil d’Etat rappelle dans son 9° considérant, que les insecticides néonicotinoïdes ont un impact majeur sur « de nombreuses composantes de l’environnement sur des organismes non cibles telles que les abeilles, les macro-invertébrés ou bien encore les oiseaux » et d’ajouter que l’agence européenne de sécurité des aliments « identifie un risque pour la santé humaine (incidence sur le développement du système nerveux) ». Le Conseil d’Etat ajoute que la Commission européenne partage ces préoccupations et que d’autres risques possibles ne sont pas à éluder.

2°/Enfin, le Conseil d’Etat pointe clairement dans son considérant numéro 20, l’incapacité des firmes productrices de pesticides de venir apporter un quelconque « élément probant de nature à remettre en cause les données scientifiques attestant des risques liés à l’utilisation des néonicotinoïdes visés par l’interdiction ».

Depuis toujours, les associations environnementales comme Terre d’Abeilles et Générations Futures et les syndicats apicoles SNA et Unaf ont défendu l’interdiction des insecticides néonicotinoïdes devant la justice. Le SNA, par la voix de son avocat Maître François Lafforgue, se félicite de cet arrêt qui est l’aboutissement d’un long combat judiciaire, dans lequel les apiculteurs n’ont pas démérité. Pour Frank Alétru, président du SNA, « l’attitude jusqu’au boutiste de l’UIPP démontre leur réelle volonté de ne pas accompagner dans les actes la transition agroécologique qui s’impose ; cette fois-ci, la justice a tranché ! »

Cette décision constitue une étape importante dans la lutte contre les pesticides tueurs d’abeilles et redonne espoir à toute une filière, pour revenir à une interdiction générale de ces substances tueuses d’abeilles, en abrogeant les dérogations accordées pour l’enrobage des semences de betteraves sucrières.